Pourquoi allume-t-on sa première cigarette ?
Qu'est-ce qui fait qu'un jour on se décide, suivant l'expression d'un célèbre psychiatre, à "brûler de l'herbe avec sa bouche" ?
Ce n'est certainement pas pour le goût acre de la première cigarette, plutôt désagréable en soi, certainement pas non plus par manque de nicotine puisque nous l'ignorons.
Ceci pour remarquer que fumer ne dérive même pas d'un besoin naturel comme manger peut devenir manger trop ou boire, boire trop d'alcool, puisqu'au départ notre corps n'a jamais été bâti pour faire de la fumée.
Ce besoin que nous nous créons ou que l'on nous crée est purement artificiel. Il correspond en fait à une triple attitude :
attitude personnelle, attitude vis-à-vis d'un groupe, attitude de l'environnement social.
À l'échelon de l'individu
Après une période de rejet du tabac ou du moins de la fumée comme agent irritant, qui va jusqu'à dix ans, se réveille le goût de l'inconnu, voire de l'interdit.
L'attirance vers une habitude d'adulte, à l'âge où l'on rejette l'adulte tout en souhaitant prendre sa place.
Le fait d'ailleurs que cette habitude puisse avoir une connotation dangereuse n'est pas un frein, car à l'âge de l'adolescence, d'une part on se croit immortel, d'autre part on a facilement la tentation de braver le sort.
L'environnement familial, suivant qu'il est fumeur ou non, a un rôle important de protection ou au contraire de facilitation de l'habitude.
Certaines adolescentes, mécontentes de leur aspect physique, commencent bien à fumer pour perdre du poids !
À l'échelon du groupe
C'est le groupe des jeunes, des ados.
La cigarette devient un objet d'intégration, un rituel d'initiation, un véritable calumet de la paix.
Elle conditionne d'une certaine manière l'adhésion au groupe qui est tant recherchée. L'incertitude de la personnalité entraîne un désir d'uniformisation : être comme les autres est le but suprême.
À l'échelon de l'environnement social
Moins, certes, depuis l'interdiction de la publicité sur le tabac, mais une loi est souvent détournée ou contournée, on le voit tous les jours. Il n'y a pas encore si longtemps que la publicité valorisait le fumeur : c'était le cow-boy bronzé d'une certaine marque de cigarette américaine.
On omettait toutefois de signaler que ses poumons étaient encore plus bronzés que sa figure.
Il n'y a pas si longtemps qu'à l'armée, lors du service national obligatoire, on retrouvait dans la ration, à côté du cirage et de la brosse à dents, les fameux paquets de troupe. Nombreux sont ceux qui ont appris à fumer à cette occasion.
Dans l'ensemble, tout, dans notre société, porte au tabagisme ; tout le monde ne fume pas, mais que nous le voulions ou non, nous vivons dans une société de fumeurs. Aucune dépendance n'est vraiment constituée à ce stade.
Seule la dépendance comportementale est en train de débuter : on fume uniquement pour le geste. |